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jeudi 24 avril 2014

"Inna" de Caroline Fourest

KSi Jeanne d'Arc vivait à notre époque, il y a fort à parier qu'elle aurait été Femen. Même détermination dans l'action, même courage, même charisme.

"Femen est le nom du nouveau féminisme. Nos seins nus sont nos armes. Notre mission est de protester. Notre Dieu est une femme."
Les Amazones se coupaient un sein pour ne pas être gênées quand elles tiraient à l'arc, les Femen se battent avec les leurs, bien que "femen" signifie "cuisse" en latin.


3 ennemies: l'industrie du sexe, les dictateurs et les religions.

Il est des combats qui ne se livrent pas par la parole et la concertation si on veut sinon les gagner du moins obliger la partie adverse à considérer que vous êtes un adversaire avec qui on peut négocier. Il y a des gens et des groupes qui ignorent le dialogue et le raisonnement rationnel, d'autres qui ne connaissent que le rapport de force. Contre ceux-çi le choc de la provocation, contre ceux-là l'opération commando qui va jeter un doute sur un pouvoir qui exprime sa lâcheté par la violence.

Inna Shevchenko, ukrainienne, jeune et belle, intellectuellement brillante, est une co- fondatrice de ce mouvement. Elle vient d'un pays conservateur où encore la religion dicte la morale, où, comme en Russie, la violence est un moyen politique, où les orientations sexuelles différentes ne sont pas admises. Poutine pourchasse les homosexuels, emprisonne et torture les personnes qui osent des opinions démocratiques. Il a même mis en place une instance qui juge et punit les déviants, tel le tribunal de l'Inquisition au XVème siècle. 

Réfugiée en France, elle installe son QG, le Centre International des Femen, au Lavoir dans le quartier de la Goutte-d'Or à Paris d'où elle mène avec son groupe de filles tous les combats contre l'intégrisme religieux, contre les fanatiques de la famille traditionaliste, contre les Jeunesses Nationalistes et Civitas, contre la prostitution, surtout des filles de l’Est.

"Pour être Femen, il faut soit aimer son corps, soit être capable de l'oublier. Ce n'est pas le moindre défis dans un monde où l'enveloppe des femmes est si durement scrutée." 

Inna se bat pour le Mariage pour Tous, pour la défense des droits des homosexuels, pour le droits des femmes de disposer de leur corps comme elles l'entendent, pour la défense de la démocratie partout où la liberté de conscience est menacée, en Russie en soutien au Pussy Riot, en Biélorussie, en Ukraine, en Tunisie, en Egypte, en France bien sûr etc.
Devrions-nous être outrés par ses seins nues qui sont les armes de son combat ? C'est oublier que la Marianne du tableau de Delacroix entraîne le peuple les seins libres tel le rostre d'un navire de l'Antiquité. Je n'ai jamais entendu que l'on s'est un jour insurgé contre notre tableau républicain.
Le sein nu, symbole d'émancipation dans l'Antiquité gréco-romaine ou bien expression de la beauté dans de nombreuses sociétés primitives ou par l'aristocratie à la Renaissance et ce jusqu'au XIXème siècle. 
C'est à cause de la morale religieuse, surtout chrétienne et musulmane, que les femmes ont couvert leurs seins. Et les Femen se battent contre ce fanatisme qui permet à l'homme de soumettre, battre, lapider, violer et répudier sa femme en toute impunité.

Inna obtiendra l'asile politique en France et les lycéens pré-sélectionneront son effigie pour le nouveau timbre que choisira le président Hollande.

Jeanne d'Arc a été brûlée vive à Rouen. Le Lavoir des Femen a été incendié. Acte criminel ? L'enquête cours encore !

Caroline Fourest, journaliste, essayiste et réalisatrice, dont j'aime le combat et la justesse de la pensée, a écrit ce livre.  Son action est déterminée et efficace. Tout en relatant l’histoire des Femen qu’elle couvre et encourage, elle nous confie avec une infinie délicatesse de propos son amour pour Inna. 
Elle n'est pas toujours d'accord avec l'égérie des Femen qui ne comprend pas bien notre concept de laïcité qui permet en France de débattre et de critiquer de tout, qui autorise chacun à vivre selon ses croyances et ses convictions sans être inquiété.

En 1961, une photo de Paris-Match avait ébranlé ma sensibilité d'enfant et restera à jamais gravée dans mon esprit. Patrice Lumumba, le libérateur du Congo belge, vient d'être assassiné. Devant les photographes, sa veuve déchire ses vêtements exhibant ses seins. Des larmes coulent sur son visage. "Regardez, semblait-t'elle dire, je suis cette femme... "

1 commentaire:

  1. adieu à la gare à un ami - la même envie d'arrêter les aiguilles, d'arrêter le temps, de prolonger le moment de l'intimité et de bonheur. Inna est devenue mon amie avec qui j'ai souffert, que je comprends, qui me confirme que je peux être fière de faire partie de ce peuple slave! Quel courage! Quelle folie! Ou peut être un courageux c'est forcément quelqu'un d'un peu fou?!
    Caroline Fourest nous invite à faire le chemin dans la vie et dans le monde sentimental d'Inna. Dans son livre elle explore cette âme ukrainienne et souvent Caroline est perturbée par la façon de cette jeune femme de vivre ou de voir les choses. De mon côté, étant ukrainienne, je comprends tout à fait Inna. Je l'admire pour son courage et sa détermination. Le moment très émouvant de ce livre c'est la lettre de Caroline à Inna: " Une armée d'ascètes...sans plaisir, sans amours ni confort? Ta révolution sans amour ne me fait pas envie, Inna, et tue mon désir pour toi" Cela confirme que il y a une peur d'Inna que Caroline n'a pas compris. La peur du bonheur ... De posséder quelque chose qui va figer les pensées, qui va la rendre dépendante ...Nous sommes tellement plus libres quand nous n'avons rien à perdre...
    OL

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