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dimanche 19 janvier 2014

Philomena de Stephen Frears

Dans les années 50, enfanter hors mariage était difficilement toléré dans la société. Les jeunes filles à qui cette épreuve survenait, étaient appelées avec mépris et commisération des filles-mères. Souvent le père était inconnu ou ne reconnaissait pas l'enfant. Alors tombaient sur la mère les pires des châtiments tel celui que raconte le film de ces enfants en très bas âge qui étaient arrachés à leur mère pour être adoptés-vendus à des familles nord-américaines. 

L'histoire commence et finie en Irlande, pays où la religion était jusqu'à récemment encore étouffante pour la population. 
1952. Une institution pour filles-mères, quelque part du côté de Limerick, tenue d'une main de fer par des religieuses sadiques qui pour extirper le péché de fornication du corps et de l'âme de ces pauvres filles, les séparaient à jamais de leurs enfants. 

50 ans après Philomena/Judi Dench, qui vit désormais au Royaume Uni, veut retrouver ce fils volé. Son destin croise Martin/Steve Coogan, star du journalisme politique récemment licencié de la BBC. Il va l'aider jusqu'aux USA à rechercher Anthony. Les 2 personnages feront ce couple dissemblable: elle, infirmière, simple, très catholique, lui, sorti de Oxford, athée, cynique et snob. Elle a une coiffure à bigoudis, il a des vestes en tweed de coupe pure Old England.  
Frears nous conduit de surprises en rebondissements jusqu'au dénouement. Les révélations les plus tragiques sont énoncées sur le même ton amène qui sert à commander le pancake au petit-déjeûner. L'émotion reste suspendue au bout des lèvres. Mise à distance du malheur qu'en Angleterre on gère avec l'humour. Never complain, never explain ! C'est délicat ! Il n'y a pas de pathos ! Les larmes sont peu nombreuses, silencieuses et belles.

Au début il y a du thé et du cake, à la fin il n'y en a plus !

Vous avez aimé Judi Dench en M, craignant pour la vie de James Bond, vous l'adorerez en Philomena dans sa détermination à rechercher ce fils aimé !

Du très bon cinéma ! 



jeudi 16 janvier 2014

"L'Amour est un crime Parfait" des frères Larrieu






Ce film est d’une effroyable beauté ! Cet oxymore conduira le film. 

Dans ces paysages de montagnes enneigées merveilleusement cadrées par la caméra des frères Larrieu, Marc/Mathieu Amalric est professeur d’écriture à l’Université de Lausanne, établissement dont l’architecture ondule en douces rondeurs et courbes tout en verre et en béton s’harmonisant ainsi parfaitement avec les collines couvertes de vignobles du canton de Vaud. 
Affecté d’un dédoublement de la personnalité, Marc passe de Don Juan à assassin sans qu’un remord vienne contrarier ces dessins diaboliques. Il y aura Barbara, puis un policier, les 2, tués par Marc qui les précipite dans un trou sombre quelque part dans les montagnes proches de chez lui. 

Dr Jeckyll qui assure magistralement son métier de professeur, et Mr Hyde qui séduit ses élèves et tue Barbara/Marion Duval. 

Il vit dans un chalet retiré avec sa sœur Marianne /Karin Viard, liés tous les deux par un tragique évènement: battus par leur mère, Marc, enfant, incendie la maison familiale où leurs parents périront et s’enfuie avec sa sœur. Marianne lui évitera l’éviction de son poste d’enseignant pour son comportement pervers envers ses élèves, en sortant avec Richard/Denis Podalydès, adjoint du Président de l’Université.

La classe d’écriture ressemble à un studio de casting où évoluent des miss intello plus ravissantes les unes que les autres. L’une d’elles, Annie/Sara Forestier harcèlera violemment Marc de ses assiduités. 
Annie, petite fille riche et désoeuvrée, mais perverse aussi, qui tue son temps à l'Université.

Survient Anna/Maïwenn, qui s’invente un personnage et joue l’état amoureux envers Marc, simulacre pour cacher son métier de flic qui soupconne Marc de savoir quelque chose sur la disparition de Barbara. Celui-là tombera sans résistance dans ce filet de sensualité tendu par Maïwen magnifiquement traitée par les frères Larrieu. Si c’est pas de l’amour, ça lui ressemble ! 
Mais à ce stade là on ne sait pas qu'elle est policier et on s'émeut encore de cette amour sincère qu'elle joue.

Dernier acte, dans un luxueux cabanon sur pilotis au-dessus du lac Léman, Marc qui trouve un pistolet dans le sac d’Anna, son cerveau qui se rend, l’aveu qui sort de sa bouche, Anna qui s’en va, les policiers qui cernent le cabanon, et Marc qui se suicide par explosion au gaz. Fin sur une vue Lausanne illuminée, lanuit, depuis quelque part sur le lac Léman. 

Thanos et Thanatos.

Il y a dans ce film une atmosphère de somnambulisme. Les timbres de voix sont neutres, dramatiques, décalées. On vit toutes ces journée dans ces brouillards givrants, ces couleurs grises pâles typiques de ses contrées suisses en hiver. Les silences sont profonds. Les personnages évoluent dans ce cadre paisible et luxueux du canton de Vaud dans lequel rien ne contrarie leur vie petite-bourgeoise. 
Les frères Larrieu pourraient être par ce film les dignes héritiers de Chabrol qui a tourné dans le même cadre et pour une énigme approchante Merci pour le Chocolat superbement interprété par Jacques Dutronc, Isabelle Huppert et Anna Mouglalis. 

Le film est brillant. A voir absolument